Abstract |
L’objectif de la présente recherche est de proposer un test économétrique de la validité relative des modèles de comportement du ménage unitaire et collectif, à l’aide des données de l’enquête prioritaire du Burkina Faso de 1994-95. Les résultats obtenus semblent justifier les enseignements des modèles non-coopératifs — le bien-être du groupe est fonction, en partie, de l’identité de celui qui est à l’origine des gains du ménage —, la littérature anthropologique africaine et ce que l’on observe couramment quant au fonctionnement des ménages sur ce continent. D’une part, l’estimation de fonctions de demande indique que la part des revenus des épouses ou femmes chefs de ménage affecte significativement: (i) positivement les dépenses alimentaires et en énergie, et : (ii) négativement les dépenses relatives aux cigarettes, tabac et matériel roulant des ménages. L’analyse montre que, lorsque ces dernières contribuent à la totalité des gains du ménage, il n’y aurait aucune variation de la dépense alimentaire des ménages si les dépenses totales étaient réduites de 2,6 pour-cent, relativement à la moyenne — pourcentage rehaussé lorsque tous les membres féminins du ménage sont pris en compte et pour les ménages pauvres. D’autre part, les équations réduites de nutrition suggèrent que, toutes choses égales par ailleurs, plus la part des revenus des femmes du ménage croît, plus la probabilité de malnutrition — insuffisance pondérale, retard de croissance et émaciation — des enfants de moins de 60 mois diminue. Par ailleurs, alors que la localisation géographique, l’éducation des mères, la structure par âge des enfants et l’accès aux services collectifs de santé et d’éducation affectent la nutrition des enfants, les coefficients des déterminants de l’insuffisance pondérale et de la malnutrition chronique apparaissent statistiquement différents selon le genre, et suggèrent un effet différentiel inhérent aux revenus féminins relatifs à l’avantage des garçons. Bien que des considérations d’équité et d’efficacité puissent justifier cette situation, l’adhésion aux règles du jeu des institutions de la société traditionnelle est probablement une explication plus convaincante que le fondement en termes de rationalité pure, même si la connexion entre les deux doit être gardée à l’esprit. Les résultats de la présente recherche ont des implications de politiques économiques, dans la mesure où la modification de la répartition des revenus intra-ménage constitue un moyen pour accroître les dépenses alimentaires, réduire les dépenses relatives au tabac et rehausser le statut nutritionnel des enfants — bien que, dans ce dernier cas, les garçons soient relativement plus favorisés que les filles. De même, le rehaussement du niveau d’éducation des femmes et le développement des biens collectifs en matière de santé et d’éducation, notamment en milieu rural, constituent de puissants facteurs susceptibles de contribuer à un meilleur statut nutritionnel des enfants. |