Abstract |
L’objectif de cette étude est d’analyser l’impact de l’éducation sur l’insertion sur le marché du travail et en particulier sur les rémunérations dans les deux principales métropoles de la République du Congo. Nous exploitons les données de première main de l’Enquête sur l’Emploi et le Secteur Informel au Congo (EESIC) de 2009 portant sur environ 3000 ménages représentatifs des villes de Brazzaville et de Pointe-Noire. Les résultats montrent que l’éducation est relativement répandue dans les deux villes, puisque le niveau moyen tourne autour de dix années d’études. Il s’agit d’un phénomène relativement ancien, car même dans les générations de plus de 50 ans, plus de huit adultes sur dix ont achevé le cycle primaire. Quant au marché du travail, il est marqué par une hypertrophie du secteur informel (plus de six actifs sur dix y exercent), qui constitue potentiellement une trappe à pauvreté et reflète un chômage élevé (surtout chez les jeunes) et croissant avec le niveau d’étude sur le marché. Le marché du travail urbain congolais présente aussi une caractéristique spécifique qui est le poids du secteur public, qui emploie presqu’un actif sur trois dans la capitale (Brazzaville) et un peu plus d’un sur cinq dans l’ensemble des deux villes. Le secteur privé formel y est donc réduit à la portion congrue. Des analyses multivariées sur le risque de chômage et l’orientation sectorielle confirment que les jeunes sont très défavorisés en matière d’insertion professionnelle : ces jeunes n’ont, pour la plupart, que le choix entre le chômage et le secteur informel. Pour mesurer l’effet propre du capital éducatif sur l’insertion dans les différents segments du marché du travail et en particulier sur les revenus de l’activité, nous abordons de front les problèmes de sélection d’échantillon (liée à l’allocation endogène entre les secteurs) et d’endogénéité de la variable d’éducation dans la fonction de revenu. Un autre défi méthodologique important concerne la spécification de la forme fonctionnelle du lien entre rémunération et années d’éducation. Dans le cadre de cette étude, nous proposons une fonction linéaire par morceaux, qui permet au rendement marginal de l’éducation de varier quand on passe d’un cycle à l’autre. Cette spécification permet de mettre en évidence le caractère convexe des rendements de l’éducation, c'est-à-dire que les dernières années du lycée et du supérieur sont les plus rentables alors que les rendements du primaire sont généralement plus faibles. Cette convexité s’observe même dans le secteur informel dans lequel l’éducation (certes à une autre échelle) est également un important déterminant des gains. Ces résultats interpellent les politiques d’emploi et de lutte contre la pauvreté à Congo-Brazzaville. Des propositions de politiques sont ainsi développées dans ce sens tout au long de l’étude. |