Abstract |
Le mariage est quasi-universel au Sénégal. Précocité du mariage et remariage rapide après le divorce ou le veuvage se conjuguent pour entraîner un niveau élevé de polygamie. Que devient la polygamie dans un contexte d'accentuation de la crise économique et de détérioration du niveau de vie, et quelles en sont les nouvelles configurations ? Cet article s'appuie sur les résultats d'une étude biographique menée à Dakar en 1989 et sur le recueil d'entretiens approfondis. L'analyse des biographies montre que peu de variables concernant les hommes influent sur le risque de devenir polygame. Par contre, deux facteurs favorisent le divorce de la première épouse: les situations de précarité du mari (chômage, manque de logement) et la venue d'une seconde épouse. Au cours des entretiens, les hommes se déclarent en général plutôt favorables à la polygamie, et ce, quel que soit leur niveau d'instruction. Diverses attitudes à l'égard de la polygamie sont relevées chez les femmes, allant de la résignation à l'hostilité en passant par le réalisme. Les réactions féminines reposent cependant sur un fond latent d'opposition à cette institution. Cependant la pression sociale est telle vis-à-vis du mariage que certaines femmes non mariées sont prêtes à entrer dans une union polygame, et à conforter, malgré elles, cette institution. La liaison entre la ville et la polygamie n'est pas aussi " négative " qu'on l'a supposé. I1 n'est pas étonnant que la polygamie se maintienne à Dakar, dans un environnement oÙ cette institution est confortée. Elle bénéficie d'une " légitimité " officielle, religieuse et sociale ; elle jouit d'une normalité qui en banalise l'existence |