Gouvernance Socioéconomique, Politique, Sécuritaire et Résilience a la crise 2012 au mali : enjeux et perspectives

Type Report
Title Gouvernance Socioéconomique, Politique, Sécuritaire et Résilience a la crise 2012 au mali : enjeux et perspectives
Publication (Day/Month/Year) 2014
URL http://www.maliapd.org/IMG/file/pdf/5_Publications et documents/RNDH_edition​2014_RAPPORT_FINAL_PDF.pdf
Abstract
Situation économique
Malgré une situation difficile en 2012 que le Mali a traversée, l’année 2013 a été marquée
par une relative stabilité socio - politique et économique.
L’économie malienne a enregistré un taux de croissance du PIB de 1,7% en 2013 contre 0,0%
en 2012. Cette croissance a été tirée par les secteurs secondaire et tertiaire. L’inflation a
connu un niveau inférieur à la norme communautaire de l’UEMOA (3,0% maximum) en
2013. La consommation finale et les recettes ont connu une hausse.
Situation sociale
La situation sociale en 2013 a été relativement apaisée par rapport à 2012. Les élections
présidentielles et législatives ont été tenues dans un climat de paix. Après les récents
évènements de la région de Kidal, les nouvelles autorités ont accéléré le processus de
dialogue et de la négociation dans la résolution de la crise au Nord du pays.
Indice de développement humain
L’IDH calculé au niveau national est de 0,354 en 2012. L’IDH mondial au titre de 2012
(publié dans le Rapport mondial 2014) s’est établi à 0,406.
Le retro-calcul de l’IDH dans le RMDH 2014 donne une valeur de l’IDH de 0,407 pour
l’année 2013 pour le Mali soit le 176ème rang sur 187 pays classés. En termes d’évolution,
on constate que la valeur de l’IDH mondial du Mali a connu une croissance moyenne de
2,13% par an sur la période 2000-2013.
Gouvernance et résilience
Dans cette étude, il s’est agi (i) de faire une analyse des mécanismes de gouvernance
socioéconomique, politique et sécuritaire et d’évaluer leurs effets de 1991 à nos jours
notamment en ce qui concerne l’avènement de la crise de 2012, (ii) d’identifier et analyser
les types de résilience adoptés par les agents économiques pour faire face à la crise politique
et sécuritaire, et (iii) de formuler les recommandations permettant d’améliorer la gouvernance
économique, sociale, sécuritaire et la résilience à la crise en vue d’instaurer un
développement inclusif et durable au Mali.
La gouvernance est perçue comme un mode de gestion des affaires publiques d’un pays où
les principaux acteurs, notamment l’Etat, le Secteur Privé et la Société civile travaillent
ensemble à la définition, à la formulation, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques
nationales.
Quant à la résilience, elle se définit comme la capacité à trouver des réponses positives, que
sont la résistance et le rebondissement, à une perturbation quelconque produite par un danger
qui a été mal contenu faute d’une insuffisance de protection rendant vulnérable.
L’analyse structurelle du système Mali, menée lors de la réalisation de l’étude nationale
prospective Mali 2025 pour identifier les facteurs clés de l’évolution du pays, a mis en
lumière le rôle moteur et structurant de la gouvernance pour le devenir du Mali.
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La crise de 2012 au Mali a mis en lumière les faiblesses de nos systèmes de gouvernance
politique, sécuritaire et socioéconomique. Qu’il s’agisse du fonctionnement régulier de notre
système démocratique, la problématique de la participation citoyenne et la gouvernance
locale qui n’a pas encore produit tous les effets escomptés.
Ce résultat est confirmé par l’analyse des systèmes de gouvernance politique, socio-
économique et sécuritaire qui montre que l’une des principales causes de la crise réside dans
les insuffisances de ces systèmes.
 Gouvernance politique
La démocratie malienne, malgré d’importants acquis, comporte de nombreuses faiblesses : le
déséquilibre au profit de l’exécutif en matière de séparation des pouvoirs, le faible taux de
participation et la mauvaise organisation des élections, des partis politiques en nombre
pléthorique et peu représentatifs, une presse peu professionnelle, une société civile ayant peu
de capacités, une administration publique perçue comme inefficace et minée par la
corruption.
La décentralisation, qui est perçue comme la réforme administrative la plus importante du
Mali, a permis la création des différents niveaux de collectivités territoriales dotées d’organes
élus. Cependant, le processus est confronté à de nombreuses difficultés notamment la
question de participation voire d’implication des populations dans la conduite de la politique
et particulièrement le challenge du sentiment de vouloir vivre collectif.
La corruption reste perçue comme le principal mal de la gouvernance et annihilerait la
majorité des efforts consentis pour le développement. Elle touche pratiquement l’ensemble
des secteurs notamment politique (i), de l’armée et de la sécurité (ii), de la santé (iii), de
l’éducation (iv), du secteur financier (v), et de la justice (vi). La lutte contre la corruption,
bien que figurant au cœur des priorités des populations, tarde à enregistrer les résultats
escomptés du fait (entre autres) de l’impunité. Cet état de fait seul ne saurait expliquer la
crise multisectorielle que le pays a connue mais constitue, sans doute, un élément majeur qui
l’a favorisée.
Selon les données de l’enquête Afro baromètre, les performances du Gouvernement dans la
lutte contre la corruption sont en baisse depuis 2005. La proportion de des Maliens qui jugent
"plutôt mal à très mal" la réponse du Gouvernement à la lutte contre la corruption est vite
passée de 59% en 2008 à 69% en 2012 soit une augmentation de dix (10) points de
pourcentage en quatre (4) ans ».
Egalement les données de Transparency International illustrent la gravité du problème de la
corruption au Mali. De 2003 à 2013, on observe environ une moyenne de l’indice de l’ordre
de 3 selon la perception de la corruption dans le secteur public.
1
L’indice varie de 0 (haut
niveau de corruption) à 10 (haut niveau d’intégrité).
La justice est l’un des domaines les plus sensibles en matière de gouvernance. Elle est le
domaine qui permet de redresser les torts. Le constituant malien l’a élevé au titre de pouvoir,
indépendant des deux autres, s’exerçant par la Cour suprême et les autres cours et tribunaux.
Le pouvoir judiciaire a été l’objet de nombreuses attentions se traduisant par des réformes
successives. La dernière de ces réformes, le Programme Décennal de la Justice (PRODEJ) a
enregistré des résultats encourageants.
Cependant, du fait de certaines faiblesses, la gouvernance judiciaire reste confrontée à
certains problèmes qui altèrent sensiblement sa qualité : la situation des décisions de justice et
l’accès, ainsi que le traitement, de certaines couches défavorisées (les femmes et les pauvres)
aux services judiciaires.
 Gouvernance socioéconomique
Le système de planification s’est considérablement affaibli à l’occasion de l’avènement des
politiques d’ajustement structurels et des programmes de lutte contre la pauvreté. Ces
politiques n’ont pas produit les résultats escomptés. Particulièrement, les programmes de lutte
contre la pauvreté n’ont pas atteint leurs objectifs de croissance et de réduction de la
pauvreté, idem dans les régions du Nord même si la pauvreté a régressé là, moins vite que
dans le reste du pays. Selon les données du rapport de l’Enquête Modulaire et Permanente
Auprès des Ménages 2011, l’incidence de la pauvreté est passée de 55,6 % en 2001 à 45,4%
en 2011, soit une baisse d’environ 10 points de pourcentage sur la période. Entre 2010 et
2011, l’incidence de la pauvreté a légèrement augmenté de 1,8 point de pourcentage.
La vision de l’ENP Mali 2025 est évoquée dans tous les documents de politique généralement
en ces termes : « les objectifs sont cohérents avec la vision Mali 2025 ». Cependant, à michemin
du terme de l’ENP, l’évolution du Mali est beaucoup plus proche du scénario
catastrophe. Un scénario étant la description d’une situation future et de l’enchainement des
évènements qui ont conduit de la situation présente à cette situation future, ce qui est arrivé
n’est que la conséquence des décisions prises, des actions menées et des comportements
adoptés par les différents acteurs de la gestion du pays. En d’autres termes, la crise est
principalement due à la mal gouvernance.
Les politiques sociales font l’objet de plusieurs programmes dont les dispositifs
institutionnels de formulation et de mise en œuvre consacrent une large place à la
participation des différents acteurs des secteurs concernés. Les résultats de ces politiques sont
cependant mitigés notamment dans le secteur de l’éducation avec des résultats quantitatifs en
progrès et une qualité en détresse.
 Gouvernance sécuritaire
Les accords qui ont été signés depuis 1990 à la suite des négociations et leur application,
même timide, ont été largement interprétés comme le signe de la faiblesse de l’Etat malien à
contenir les menaces. Si ces différents accords ont permis d’apaiser momentanément la
fronde, il faut noter que certaines de leurs causes ont fini par saper les fondements de la
République du Mali.
C’est de là que ressort l’approche clientéliste de gestion du pouvoir car, la création des unités
spéciales confiées aux Touaregs frondeurs, la démilitarisation graduelle des régions de Nord
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du Mali au profit des groupes et des milices récupérés par des acteurs mal intentionnés a
contribué à l’effondrement de l’Etat malien.
Ce sont ces errements de l’État qui ont sapé le capital de confiance existant entre les pouvoirs
publics et les populations et ouvert une grave crise sécuritaire que le Mali n’a jamais connue.
Au regard de l’enchevêtrement de ces facteurs cités, il est évident que les conditions étaient
réunies pour une déstabilisation de l’Etat. L’absence de l’Etat et de ses services de sécurité a
été saisie par les groupes terroristes qui ont fait de cet espace un lieu de refuge.
Après les évènements de 2012 on peut affirmer que la défense du Mali est quasi
approximative. Sa logique semble s’inscrire dans celle du pompier qui consiste à éteindre le
feu dès qu'il embrase une zone, notamment celle du Nord.
 Résilience
L’agression qui a frappé le Mali en 2012 a été d’une violence sans précédent dans l’histoire
des rebellions. Son ampleur s’explique, en partie, par le fait que des forces extérieures y ont
pris part, afin de préserver un espace sans loi ni foi qu’elles avaient réussi à constituer à la
faveur des différents accords de paix qui avaient recommandé un retrait du dispositif
sécuritaire national de la partie nord du pays.
Suite à l’occupation du nord, de nombreuses personnes se sont déplacées. Celles qui n’ont
pas franchi les frontières nationales ont été appelées des déplacés. Ces derniers aussi bien que
les personnes qui n’ont pu le faire, pour diverses raisons ont bénéficié d’une solidarité
parentale, communautaire, nationale et internationale d’une importance inégalée jusque-là.
Un interlocuteur interviewé dira à ce propos que « la solidarité n’est pas un vain mot, elle a
été une réalité ici. La solidarité est nécessaire pour que les choses marchent ». Cette
solidarité, qui s’est traduite par une mobilisation générale, a donné un visage humain à ces
déplacements de personnes. Le faible nombre de déplacés ayant vécu dans des camps ou
centres de déplacés est la manifestation d’une grande solidarité familiale. La mobilisation de
cet élan de solidarité a été un facteur de résilience, en termes de résistance, particulièrement
important.
La seconde composante de la résilience, qui est le rebondissement, reste à entreprendre. La
reprise d’une vie normale, à travers des activités créatrices de biens et de revenus, reste
particulièrement timide. La présence de l’Etat, à travers la fourniture de services, reste encore
faible. Les partenaires ne sont pas encore prêts à engager des fonds dans un contexte de
sécurité très volatile.
Le Mali doit faire face à de nombreux défis dont la consolidation de la paix et de la sécurité,
la refondation de son système de gouvernance démocratique, éducative et sanitaire ainsi que
la mise en place de conditions propices à la formation et à l’emploi des jeunes. Le retour
définitif de la paix et de la sécurité est le fondement de tout progrès social.
Le rapport adresse une série de recommandations dans les trois (3) domaines de gouvernance
abordée à l’attention du Gouvernement, de l’Assemblée Nationale, des Organisations de la
Société Civile et des Partenaires Techniques et Financiers. Il est urgent et impératif chacun en
ce qui lui concerne de jouer pleinement sa partition dans la mise en œuvre de ces
recommandations notamment en mettant en place des systèmes de veille et d’alerte pour
éviter une résurgence de la crise.

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